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Assurance-crédit au Maroc: Interview avec l’expert Alaa El Moutouaj

L’assurance-crédit, qui a pour finalité de protéger les entreprises contre le risque d’impayés, est un secteur qui ne cesse de se développer au Maroc depuis plus de trois décennies.

Dans une interview à la MAP, Alaa El Moutouaj, expert en Assurance-crédit et responsable commercial chez Coface Maroc, dresse un état des lieux de ce marché de niche et met en lumière les perspectives de croissance, mais aussi les défis à relever.

Comment définissez-vous l’assurance-crédit et quel rôle joue-t-elle dans l’économie ?

L’assurance-crédit est une solution complète pour se prémunir contre le risque d’impayés. Elle repose sur une relation tripartite entre l’assureur-crédit, le client (l’entreprise fournisseur assurée) et l’acheteur.

Il s’agit d’un package regroupant trois services indissociables. La prévention des risques de crédit, le recouvrement des créances impayées et enfin, l’indemnisation.

L’assurance-crédit joue un rôle économique essentiel, en couvrant les entreprises contre le risque de défaillance des clients auxquels elles accordent des délais de paiement. Elle représente la solution la plus adaptée pour sécuriser la trésorerie des entreprises et le crédit inter-entreprises, qui constitue une source très importante de financement de l’activité économique.

Quel état des lieux dressez-vous du marché de l’assurance-crédit au Maroc (taille du marché, opérateurs, régulation …) ?

L’assurance-crédit au Maroc demeure un marché de niche. A fin 2019, ce marché représente un volume de prime d’environ 249 millions de dirham au Maroc, en croissance moyenne annuelle de 14,6%. Il représente 0,6% du marché global de l’assurance au Maroc (source : situation liminaire 2019 de la Fédération Marocaine des Sociétés d’Assurances et de Réassurance – FMSAR).

Cela étant dit, le marché de l’assurance-crédit se développe très fortement depuis 2008, année de crise économique mondiale qui avait également impacté l’économie marocaine.

La crise sanitaire et économique du Covid-19 aura aussi et sans doute, un impact considérable sur le marché de l’assurance-crédit. En effet, c’est dans ce contexte de crise économique que les bénéfices de l’assurance-crédit se sont fait sentir. Ce marché sous pénétré pourrait donc connaître une croissance en volume et en valeur à court-moyen terme, favorisée par la prise de conscience des entreprises sur les bénéfices de l’assurance-crédit dans un contexte de crise et d’incertitude.

Les acteurs principaux du marché marocain sont Coface Maroc, Euler Hermes Acmar et Smaex. Ils se répartissent 99% des parts du Marché.

Concernant le système de régulation, et comme pour toutes les branches d’assurances au Maroc, c’est l’Autorité de Contrôle des Assurances et de la Prévoyance Sociale (ACAPS) qui se charge de réguler le secteur des assureurs crédit.

Quelles sont les conséquences du Covid sur les défaillances d’entreprises dans le monde ? Est-ce que la crise sanitaire et les incertitudes qui en découlent ont incité les entreprises marocaines à souscrire davantage d’assurances crédit ?

Selon le dernier baromètre de Coface, nous constatons une baisse mondiale de 12% des défaillances d’entreprises en 2020. Ceci est clairement imputable aux plans de soutien gouvernementaux et leur maintien conditionnera la survie de nombreuses entreprises cette année.

Si le recours accru à l’endettement a permis d’éviter beaucoup de défaillances, cette montée de l’endettement des entreprises dans un contexte de taux d’intérêt bas et d’activité économique en berne fait craindre la multiplication d’entreprises “zombies”, c’est-à-dire toujours en vie, mais trop endettées pour investir et croître.

Coface anticipe que l’impact du choc observé en 2020 conduira d’ici 2022 à une augmentation mondiale du nombre de défaillances par rapport à 2019, malgré l’impact de ces divers plans de soutien gouvernementaux.

Par ailleurs, au Maroc, les délais de paiement se sont largement détériorés dès le début de la crise sanitaire : 53 jours supplémentaires en moyenne selon la troisième édition du baromètre de la CGEM. L’allongement des délais de paiement a donc une conséquence immédiate sur le risque d’impayés des créances commerciales.

Par conséquent un très grand nombre d’entreprises marocaines a sollicité les services des assureurs crédit pour protéger leurs postes client.

A titre d’exemple, pour Coface, les nouvelles souscriptions en valeur ont augmenté de 50% au 1er trimestre 2021 comparativement à la même période en 2020.

Quelles sont les entreprises et les secteurs d’activité les plus concernés par l’assurance-crédit ?

Une entreprise peut s’assurer crédit dès lors qu’elle est amenée à accorder un délai de paiement à ses clients. Les entreprises qui opèrent dans des secteurs concurrentiels et qui pratiquent des marges faibles à moyennes, sont très demandeuses de produits d’assurance-crédit, car le moindre impayé peut avoir des conséquences dramatiques sur la situation financière de la structure.

En ce qui concerne les secteurs d’activité les plus représentés dans le portefeuille clients des assureurs crédit, on retrouve les secteurs de la chimie, de la pharmaceutique, de l’agriculture (Export), des hydrocarbures, du BTP, de l’agroalimentaire, de la distribution, et de l’automobile.

Quelles sont les perspectives de croissance mais aussi les défis qui se présentent dans ce domaine ?

Le secteur de l’assurance-crédit se développe au Maroc depuis plus de trois décennies. L’année 2008 a représenté un point de rupture par rapport aux années précédentes. A titre d’exemple, entre 2007 et 2008, les souscriptions en assurance-crédit ont bondi de 22% du fait de la crise économique mondiale (source : situation liminaire 2008 de la FMSAR).

Depuis, le taux de croissance de cette branche évolue à un rythme beaucoup plus rapide que celui des autres branches d’assurances.

Néanmoins, le taux de pénétration (total de primes émises par rapport au PIB) de l’assurance-crédit reste bien plus faible que celui du marché des assurances en général au Maroc (3,7% pour l’année 2019 selon l’ACAPS).

On constate une amélioration continue de ce taux de pénétration grâce à l’amélioration de l’accessibilité de l’information financière. Cette matière première étant le nerf de la guerre de l’assurance-crédit, son exploitation reste à mon sens l’un des principaux défis qui s’imposent aux assureurs crédit pour développer encore plus ce marché en pleine expansion.

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