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LF-2021: l’heure n’est pas à l’austérité !

Par: Youness Akrim

Casablanca – Bien que les finances publiques ont été fortement mises à mal par la crise sanitaire, la Loi de finances (LF) au titre de l’année budgétaire 2021 a été porteuse d’une panoplie de mesures fiscales encourageantes à même de propulser une relance tant espérée par les opérateurs économiques.

Fruit d’un travail participatif mené pour garantir la relance de l’économie nationale, la LF-2021 annonce de bonnes nouvelles aux entreprises pour lesquelles l’allègement de la charge fiscale demeure une revendication centrale, d’autant plus que le spectre de la crise plane toujours sur le paysage économique.

La Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), interlocuteur privilégié et représentant du secteur privé, a salué récemment l’application de certaines mesures d’aide à la relance dans le cadre de cette LF, conformément à ses requêtes, tout en privilégiant le dialogue avec l’administration fiscale pour faire aboutir le reste de ses demandes.

Force est de constater que la LF-2021 s’est alignée sur les recommandations des dernières Assises de la fiscalité dont notamment la conformité avec les règles de bonne gouvernance en matière de fiscalité internationale, l’intégration du secteur informel, l’atténuation du coût fiscal des opérations de restructuration du tissu économique et l’incitation fiscale à l’épargne.

Pour Abdelghani Youmni, économiste et spécialiste des politiques publiques, “la LF-2021 est intervenue dans une conjoncture économique nationale et internationale d’une profondeur inédite induite par la crise liée à la pandémie du Covid-19 et ses externalités négatives sur les climats sanitaire, social et économique”, notant qu’au delà du plan de relance monétaire et budgétaire pour faire face à l’ampleur de la crise, une série de dispositions fiscales ont été prises par le gouvernement.

En matière d’Impôt sur les sociétés (IS), la LF 2021 prévoit de se conformer aux standards internationaux en procédant à l’exclusion de certaines entreprises financières du régime fiscal du CFC, rappelle M. Youmni, expliquant que le but de ce mécanisme de défiscalisation est de “favoriser des dynamiques de ruissellement entre sphère réelle productive et sphère financière”.

La deuxième mesure dans ce registre d’IS porte sur l’anticipation de probables cessions de participations dans des établissements publics et leurs filiales dans le cadre de la privatisation. “Elle a pour finalité de neutraliser l’impact fiscal sur les produits nationaux et étrangers de cessions des participations de ces entreprises publiques”.

En matière d’impôt sur le revenu, de nombreuses dispositions ont été introduites avec un accent particulier sur le volet social et l’encouragement du recrutement des jeunes. L’expert a mis en avant l’instauration de la Contribution Unique Professionnelle (CPU), plus “systémique” et à vocation “inclusive” et “solidaire”, eu égard à ses dimensions fiscale et sociale.

“Ainsi, la personne physique devient contribuable en payant l’impôt sur le revenu et cotisant en subissant des retenues de cotisations sociales. Un grand nombre de Marocains finiront par devenir acteurs dans la collecte et la répartition des prélèvements obligatoires”, a-t-il expliqué.

Quant à l’encouragement au recrutement, il a salué l’appui fiscal y afférent qui porte sur des exonérations fiscales au profit des entreprises qui emploient des jeunes de moins de 30 ans, une large frange la population et dont les NEET (jeunes qui ne sont ni en emploi, ni en formation, ni en apprentissage) y représentent plus de 29%.

Cependant, il a estimé que “les baisses de charges sociales et d’impôts sur le revenu doivent bénéficier aux entreprises dont la création de la valeur ajoutée repose sur le facteur travail et qui œuvrent pour résorber les fractures territoriales et sociales et les discriminations par le genre”.

LF 2021: une générosité annoncée ?

La crise est souvent synonyme d’austérité et de coupes budgétaires, pourtant le Maroc semble vouloir redynamiser son économie grâce à une politique budgétaire volontariste à caractère expansionniste, où l’investissement est la pièce maîtresse de la relance.

“Au moment où les autres pays du monde serrent un peu plus la ceinture en raison de la conjoncture économique difficile que traverse le monde, notre administration fiscale se montre un peu généreuse vis-à-vis du contribuable marocain”, se réjouit Zakaria Meliani, Professeur universitaire à la faculté des sciences juridiques économiques et sociales (FSJES) de Mohammedia.

Les mesures d’incitations économiques et fiscales de cette loi, commente l’universitaire, sont “diverses” et “diversifiées” et visent, entre autres, des secteurs précis à l’instar du secteur financier, a fait remarquer M. Meliani.

Également, le Maroc ne cesse de réitérer son engagement climatique et son encouragement de l’économie verte en exonérant certains produits écologiques de certaines taxes et les rendre ainsi plus accessibles à une large catégorie de citoyens, a ajouté l’universitaire.

L’immobilier, un des secteurs mis à rude épreuve par la crise, a eu droit également à des avantages fiscaux. “Ce sont les OPCI qui voient l’application de leur régime fiscal étendue aux immeubles à usage d’habitation, ce qui encouragera indéniablement les grands constructeurs jusque là réticents, puisque le régime des OPCI visait principalement la location immobilière professionnelle, à lever les fonds pour de nouveaux chantiers immobiliers”.

Face à la fraude fiscale, la LF-2021 s’est montrée ferme, avec la pénalisation de fausses factures, une pratique nuisible à l’économie nationale qui fait perdre aux caisses de l’État de conséquentes recettes fiscales. “La présentation de fausses factures à l’administration fiscale fera désormais l’objet d’une poursuite pénale par l’administration fiscale et le parquet général”, rappelle-t-il.

Emboîtant le pas à la Loi de finances rectificative (LFR), intervenue pour affronter les premières ondes de choc de la crise du Covid-19, la LF-2021 prête une main forte à l’ensemble de la communauté économique pour remettre de nouveau l’économie nationale sur les rails de la croissance.

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