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L’intelligence économique: Quels défis pour le Maroc?

Par Hasnaa ELAKKANI

Casablanca – La crise sanitaire actuelle, avec toutes les incertitudes qu’elle fait peser sur l’économie nationale, a montré une fois de plus que l’intelligence économique ne relève plus du luxe mais s’impose comme un outil de performance économique et un facteur de compétitivité du Maroc.

L’intelligence économique (IE), qui se définit comme l’ensemble des activités coordonnées de collecte, de traitement et de diffusion de l’information utile aux acteurs économiques, en vue de son exploitation, demeure ainsi un défi permanent qu’il s’agit de relever en bâtissant un système d’IE national performant et équilibré.

Si ce concept est de plus en plus prisé par des entités privées notamment des cabinets de conseil, des Think Tank, des banques, de grandes entreprises ou des associations professionnelles, il reste cependant moins présent dans les établissements publics, en l’absence d’une vision globale et d’une stratégie publique en la matière.

“Le Maroc était parmi les pays les plus conscients des avantages de l’IE. En 2011, il a été le premier pays africain qui a mis en place une plateforme Open-Data”, a souligné Ghizlane Salam, professeure d’économie à l’Université Hassan II-Casablanca dans une interview à la MAP.

Néanmoins, “cette initiative n’a pas abouti aux objectifs souhaités pour plusieurs raisons, dont la confiance au numérique reste le principal facteur à mon sens”, a-t-elle estimé, ajoutant que “c’est tout un état d’esprit qu’il faut changer”.

En fait, a poursuivi la professeure, l’IE est un processus informationnel visant à éclairer la prise de décision, assurer la protection du patrimoine matériel et immatériel, et à renforcer la compétitivité des organisations à travers le lobbying.

Ces trois facettes de l’IE représentent, aujourd’hui, plus un défi qu’une aide à la prise de décision, a précisé l’universitaire, notant qu’en réalité, l’IE passe aujourd’hui par une nouvelle étape, celle de l’adaptation avec les spécificités des pays et les stratégies internes des organisations.

Selon Mme Salam, auteure d’un ouvrage intitulé “Intelligence économique: décider à l’ère du Big Data”, le succès d’une démarche d’IE passe nécessairement par l’adhésion de tous les acteurs. C’est une attitude de coopération et d’échange entre public et privé et un engagement de chacun.

Si l’on réussit à mettre en place une bonne gouvernance de l’Open-Data, en facilitant l’accès aux données, l’Etat et les entreprises vont profiter pleinement de cet engouement, a-t-elle noté.

L’IE face à de nouvelles exigences

En ce moment de crise, a soutenu l’universitaire, l’accès, la fiabilité ou encore la qualité de l’information sur laquelle repose tout le processus d’IE, sont “totalement biaisés”.

Cela s’explique, d’après elle, essentiellement par les fake-news qui étouffent les médias et réseaux sociaux, par l’incapacité de repérer des pistes de sauvetage avec ces mutations perpétuelles, ainsi que par la corrélation positive entre les pays du monde entier.

“Notre pays en est le meilleur exemple”, a-t-elle dit, ajoutant que son secteur industriel par exemple dépend en grande partie de l’évolution de la demande internationale qui se bat à son tour pour que son activité économique reprenne ses souffles.

Face à toutes ces nouvelles données, l’économiste pense qu’il est temps pour les entreprises de sortir de leurs zones de confort et ce à travers trois actions: préparer des PCA (Plans de Continuité d’Activité) avec des scénarios différents, investir dans les RH (la poly-chronicité), réaliser des simulations de crises dynamiques et opérationnelles…

La créativité, la réactivité, l’innovation, la capacité d’adaptation… constitueront désormais les pierres angulaires du nouveau mode de management, et le système l’IE, lui, est appelé à prendre en considération toutes ces nouvelles exigences, a-t-elle noté.

Évoquant les obstacles qui entravent le développement de l’IE, Mme Salam a mis l’accent sur la corruption, le suivi des stratégies nationales et le partage d’information, qui sont, selon elle, les principaux “adversaires” de la réussite de l’IE.

Pour relever ces défis, elle a proposé deux points de départ, dont le premier porte sur la vulgarisation du concept “IE”, expliquant que le concept est mal défini, ou encore “mal perçu” et il est parfois synonyme de “piratage”, et parfois “d’espionnage”, ce qui rend difficile d’en parler, et par conséquent de le développer correctement.

Le deuxième point consiste en la mise en place d’un bon climat de collaboration privé-public, renforcé par une politique d’Open-Data contrôlée, a ajouté l’universitaire.

Et de conclure que les ressources humaines sont disponibles, les idées sont multiples et les innovations sont de plus en plus nombreuses et qu’il reste à fédérer toutes ces potentialités pour évoluer vers un “système national d’IE équilibré”.

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