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Parité USD/MAD : Trois questions à Omar Bakkou

La parité USD/MAD ne cesse de suivre, depuis plusieurs semaines, une tendance haussière, expliquée par la récente augmentation du dollar américain par rapport à l’euro qui s’est répercutée sur le taux de change du dirham.

Dans un entretien accordé à la MAP, l’économiste spécialiste en politique de change, Omar Bakkou, explique cette tendance, tout en évoquant son impact sur l’économie nationale notamment en matière d’import-export.

1 – L’appréciation du dollar par rapport au dirham a pour origine l’appréciation du dollar par rapport à l’euro. Pourriez-vous nous expliquer cette tendance ?

L’augmentation du prix d’une monnaie sur le marché international peut provenir naturellement soit de l’accroissement de sa demande, soit de la baisse de son offre, soit des deux à la fois.

Dans le cas d’espèce, l’appréciation du cours de cours de change du dollar américain comparativement aux autres monnaies provient essentiellement de l’accroissement de la demande du dollar. Cet accroissement s’explique par trois principales raisons :

-L’envolée des prix des matières premières (produits énergétiques, miniers et agricoles), puisque les prix de ces produits sont libellés en dollar américain : les pays importateurs desdits produits verront leurs dépenses en dollar augmenter ce qui impactera la demande mondiale du billet vert;

– L’augmentation du taux directeur de la Banque centrale américaine : les gestionnaires de l’épargne privée et publique (les réserves de change) auront intérêt à les placer sur le marché américain ;

-La troisième raison est liée à l’incertitude qui plane sur l’économie mondiale faisant ainsi que les détenteurs de fonds préfèrent les placer dans des actifs financiers et monétaires perçus comme les plus sûrs : bons du Trésor et dollar américain.

2 – Quel est l’impact sur les importations et les exportations ainsi que sur le marché des changes ?

L’impact de la dépréciation du taux de change du dirham par rapport au dollar américain est négatif pour les importations et positif pour les exportations.

Il s’agit d’un impact négatif pour les importations en raison de ce que cette dépréciation renchérit légèrement les prix de nos importations facturées en dollars (environ 50%), particulièrement les produits énergétiques, miniers et agricoles.

En revanche, l’impact est positif pour les exportations (environ 40%) en raison de ce que cette dépréciation leur permet de générer plus de recettes en dirhams à l’issue de leurs opérations d’exportation.

En définitive, compte tenu de la légère asymétrie entre la facturation en dollar de nos importations comparativement à nos exportations (on achète plus en dollar qu’on en vend), on peut affirmer que l’impact de l’appréciation du dollar par rapport au dirham sera globalement négatif sur notre balance commerciale.

3 – Tenant compte de l’actuel contexte inflationniste, cette hausse risque-t-elle d’exacerber la flambée des prix ?

Globalement, le lien entre le taux de change et les prix internes se présente comme une dépréciation du taux de change qui renchérit en principe les prix des importations ce qui exerce une pression à la hausse sur les prix internes (inflation importée).

Cet impact éventuel d’une du taux de change sur les prix internes n’est toutefois pas automatique et dépend de plusieurs facteurs, notamment :

– La part que représentent les importations de biens et de services dans le PIB. En effet, plus cette part est importante, plus l’impact de la variation du taux de change sur les prix internes sera fort et vice-versa. Au Maroc, la part des importations de biens et de services par rapport au PIB s’établit à environ 47% durant les cinq dernières années, degré pouvant ainsi être qualifié de moyen du fait qu’il demeure d’une part inférieur à celui enregistré dans plusieurs pays.

– Le passé inflationniste du pays concerné, dans la mesure où plus le taux d’inflation enregistré dans le passé est faible, plus l’impact de la dépréciation du taux de change sur les prix internes sera faible et vice-versa. Au Maroc, le taux d’inflation demeure bien maîtrisé : il s’est établi en moyenne à 2% durant les trois dernières décennies.

– La durée des changements du taux de change, dans le sens où plus cette durée est longue, plus l’impact de la variation du taux de change sur les prix internes tend à être fort et vice-versa.

– L’ampleur des changements du taux de change, dans le sens où lorsque la magnitude des changements des taux de change est petite, l’effet sur les prix domestiques est nul.

Or, compte tenu du fait qu’il s’agit d’une dépréciation du taux de change du dirham qui demeure modéré et qui ne touche qu’une partie de nos importations et si l’on prend en considération d’autres facteurs, notamment l’intervention de l’Etat à travers la Caisse de compensation, la tendance baissière du coût du fret enregistrée récemment , ainsi que la stabilisation des prix des produits énergétiques on peut affirmer que l’impact sur les prix intérieurs sera minime au Maroc.

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