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Reconfiguration des CVM, quelles opportunités pour le Maroc ?

Par Youness Akrim

Casablanca – Le cataclysme provoqué par la pandémie du Covid-19 a dévoilé au grand jour les limites et les vulnérabilités des chaînes de valeur mondiales (CVM) sous leur modèle actuel. Le recours à des sous-traitants lointains et des chaînes logistiques mondialisées qui fut un vecteur clé de compétitivité s’est révélé une arme à double tranchant sur fond de ruptures d’approvisionnement dans de nombreux secteurs économiques.

Après des années de boom économique et de croissance tirés par la maîtrise des coûts et des délais rendue possible grâce aux chaînes de valeur globalisées qui organisent la conception, la production et la circulation des bien manufacturés, la crise est venue changer ces paradigmes et pousser les pays occidentaux à regagner leur souveraineté industrielle en réduisant leurs dépendance vis-à-vis des puissances industrielles asiatiques comme la Chine.

Alors que se dessinent les contours d’une nouvelle mondialisation et de chaînes de valeurs réinventées qui privilégient des relocalisations régionales, le Maroc de par son expertise industrielle et logistique ainsi que sa position géographique aux portes de l’Europe se voit offrir de réelles opportunités pour intégrer de nouvelles chaines de valeurs régionales, notamment, dans l’espace euro-méditerranéen.

“A cause des coûts de production élevés, la réinternalisation de l’ensemble des chaînes de valeur en Europe me semble utopique mais une colocalisation vers les pays du voisinage des deux rives de la méditerranée pourrait être une opportunité pour le Maroc, hub entre l’Afrique et l’Europe”, a déclaré à la MAP l’économiste Abdelghani Youmni.

Le spécialiste des politiques publiques dans les pays du Sud et de l’Est de la Méditerranée (PSEM), a évoqué de nombreuses opportunités qui se présentent au Royaume suite à la reconfiguration en cours des chaînes de valeurs, notant que le Maroc recèle un potentiel de sous-traitance dans divers secteurs industriels, notamment, l’Electronique, l’Aéronautique, l’Automobile, le Textile, les produits pharmaceutique où encore le numérique.

Le Maroc jouit déjà des relations privilégiées avec l’Europe son principal partenaire commercial, dont de nombreux pays ont fait les frais d’une forte dépendance sur des chaînes de valeurs étendues et interdépendantes. “Le Maroc dispose d’un statut avancé auprès de l’Union européenne et a toujours réaffirmé sa position d’acteur agissant au sein de la région euro-méditerranéennes et de médiateur dans le voisinage élargi avec l’Afrique Sub-saharienne”, se réjouit M. Youmni.

Outre cette donne, il a fait valoir que “le Royaume a entrepris des réformes majeures tant politiques qu’économiques et sectorielles, au niveau des finances publiques, le commerce extérieur, le marché du travail, le cadre réglementaire du climat des affaires, de la compensation et puis du marché de change”.

Pour un meilleur positionnement dans le monde d’après Covid-19, l’économiste a souligné le besoin de “volontarisme” en matière de politiques publiques courageuses et visionnaires d’éducation et de formation professionnelles axées sur les métiers de la transformation et des politiques industrielles tirées par les exportations et orientées vers la substitution d’importations ce qui contribue à l’amélioration de la courbe d’apprentissage et des économies d’échelle.

Il est question également, selon l’économiste, de construire des clusters sectoriels incluant universitaires, ingénieurs et élus de régions, et de poursuivre l’attraction des Investissements directs étrangers (IDE) en les conditionnant de protocoles de partenariats public-privé productifs, tout rappelant la valeur ajoutée de ces PPP en termes d’employabilité avec des milliers de postes crées dans les secteurs de l’automobile, l’aéronautique et de la logistique.

Malgré les nombreux atouts du Maroc et son classement au 3ème rang de la région MENA en doing business, M. Youmni fait état de nombreuses “menaces” réelles émanant des fortes concurrences régionales sur certains métiers dont les plus féroces sont celles des Pays de l’Europe Centrale et Orientale, de la Turquie et de l’Egypte, ce qui rend indispensable pour une meilleure compétitivité, la qualification du capital humain et l’investissement en recherche et développement (R&D).

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