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Tourisme: Interview avec le consultant Hassan Aboutayeb

Le tourisme sur le littoral marocain va certainement conserver sa place de destination favorite des Marocains, a assuré Hassan Aboutayeb, Consultant en tourisme durable.

Avec la nouvelle donne géopolitique et le contexte incertain lié à la pandémie, de nombreux Marocains qui avaient l’habitude de partir en Europe vont préférer rester au Maroc et soutenir notre économie, a relevé M. Aboutayeb dans une interview à la MAP, dont voici la teneur.

1- Quels sont vos pronostics quant aux préférences des touristes marocains pour cet été ?

On attend une reprise graduelle grâce à l’assouplissement des mesures de protection de confinement et des restrictions de déplacement ainsi que grâce à la portée de la campagne de vaccination.

Plusieurs dynamiques se profilent. Le tourisme sur le littoral marocain va certainement conserver sa place de destination favorite des Marocains. Ainsi, la nouvelle station touristique de Taghazoute à Agadir par exemple va certainement tirer son épingle du jeu de par sa nouveauté et la communication réalisée.

Le segment de clientèle de l’été sera certainement composé de familles, petits groupes d’amis voyageant ensemble. Ils sont généralement issus de la génération Y qui vivent en ville et cherchent des vacances pour renforcer leur contact avec la nature, proposant une offre bien-être, à la fois mentale et physique, et une gastronomie saine.

Compte tenu du contexte encore fragile, il est fort possible que la tendance qui avait cours l’été dernier s’accentue à savoir que certains Marocains vont privilégier le ressourcement loin des foules à travers des hébergements à taille humaine, des formules locatives dans le monde rural ou sur le littoral où ils peuvent plus facilement pratiquer la distanciation sociale.

Dans le même ordre d’idées, les Marocains ont pris le temps de réfléchir à ce qui est important dans leur vie pendant la pandémie et cherchent à vivre de véritables expériences de voyage, par exemple, en participant au développement local des lieux qu’ils visitent.

Cependant, nous sommes encore loin de la normalisation tant attendue car les épargnes des Marocains ne sont pas au même niveau qu’avant la pandémie.

2- L’arbitrage entre destination intérieure et étrangère va-t-il changer à la lumière des derniers développements de la crise sanitaire (reprise des vols, pass vaccinal…) ?

Avec la nouvelle donne géopolitique et le contexte incertain lié à la pandémie, de nombreux Marocains qui avaient l’habitude de partir en Europe vont préférer rester au Maroc et soutenir notre économie dont de nombreux secteurs sont interdépendants. Cela va permettre à beaucoup d’entreprises du secteur touristique de sortir la tête de l’eau. Ce sera donc un véritable engagement citoyen que de voyager au Maroc.

Nous sommes un peuple connu de par le monde pour son empathie envers les plus vulnérables. La solidarité est l’une des valeurs fondamentales de notre société et nous avons tous remarqué que la crise a renforcé l’entraide.

3- Que pensez-vous de l’offre touristique disponible et du rapport qualité/prix ?

L’offre s’est beaucoup assouplie afin de pallier la crise et attirer une nouvelle clientèle. Il me semble que les professionnels de tourisme marocain ont fait autant d’efforts qu’ils le pouvaient.

Au-delà du rapport qualité-prix, beaucoup de Marocains qui séjournent dans des hébergements marchands seront très sensibles (et à raison) au strict respect des normes d’hygiène et de procédures de qualité internationale. Le label Welcome Safely pourrait jouer un rôle important dans l’immédiat et à plus long terme d’où la nécessité de le mettre en place rapidement sur l’offre touristique concernée et surtout d’engager une grande campagne de communication.

4- L’engouement des touristes marocains peut-il constituer une aubaine pour les opérateurs marocains et compenser en partie les pertes engendrées par la pandémie ?

A vrai dire, ce n’est plus une aubaine mais une priorité absolue. Cela ne compensera malheureusement pas les pertes qui s’accumulent depuis 15 mois mais cela permet un fond de roulement. De plus, à peine 15 à 20% des Marocains qui voyagent séjournent en hébergement marchand, dès lors, la demande est déjà très faible. De plus, la politique du meilleur prix qui est mise en place par la quasi-totalité des opérateurs n’engendre pas de rentabilité.

Rappelons que certaines destinations au Maroc comme Marrakech, Fès et Agadir sont plus touchées que d’autres, étant donné leur dépendance vis-à-vis du tourisme international depuis toujours.

5- Quelles sont les mesures que vous proposez pour appuyer la relance touristique ?

Les entreprises touristiques au Maroc et à l’international sont en mode de survie. Par conséquent, les professionnels attendent davantage d’appui du gouvernement en mettant en place un plan de sauvetage plus large pour le tourisme national via des mécanismes financiers et des allégements fiscaux.

Les subventions aux salaires sont bénéfiques mais il faut aussi soutenir les entreprises qui constituent le socle du tourisme. En Islande, par exemple, la taxe de séjour est suspendue jusqu’à la fin de l’année 2021.

D’autre part, des plans de formation des ressources humaines et de réhabilitation et de rénovation des structures touristiques dans les milieux urbains et ruraux doivent être mis en place rapidement avant la reprise durable de l’activité. Ces deux piliers permettront d’assurer la qualité des produits, le respect des normes internationales et la pérennité du tourisme interne.

En parallèle, une politique d’encouragement de la demande touristique nationale est indispensable pour sauver le secteur. A ce propos, au niveau international, l’OCDE et l’OMT ont rappelé que le tourisme interne est le principal levier pour assurer la relance. L’un des objectifs pourrait être d’atteindre 50% de touristes nationaux au Royaume et dans cette perspective, nous devons travailler main dans la main avec les pouvoirs publics.

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